L'arbre

Quand elle descendait par la route de Chantemerle, très souvent son regard était attiré vers le même arbre. Il était unique, il n'avait pas de nom, elle ne connaissait pas son espèce.
L'arbre était près de la maison !
Il montait verticalement, se divisait en trois branches légèrement obliques puis au sommet ses petites branches retombaient doucement et formaient trois formes séparées. Malgré la perte de ses feuilles, il était étonnant et protecteur.
Mais qui donc avait la chance d'habiter cette maison paysanne aux murs gris et au toit rouge, semblable à toutes les autres?
C'était une maison de femmes, les hommes étaient partis comme au temps de 1914; c'était une maison sans animaux! La place de l'arrière grand-mère était encore là avec son fauteuil en osier près de la cheminée. La place de la grand-mère aux cheveux argentés était à la cuisine où elle épluchait les patates et les carottes. La place de la mère était dans la société mais avec son front rebelle, elle ne l'aimait guère cette vie de chômeuse mais elle ne faisait pas assez pour en sortir.
La petite fille de huit ans s'asseyait sous l'arbre protecteur et guettait le moineau qui venait occasionnellement sur l'arbre.
Pourquoi donc toujours ce même arbre qui attirait son regard ? Elle n'y pensait pas et chaque fois, son regard allait vers la droite bien avant le village.
Puis elle continuait sa route, heureuse qu'il soit toujours là à la même place dans ses formes artistiques.