A qui parle-t-elle ?

" moi, je ne raconte pas ma vie " dit la jeune femme.
A qui parle-t-elle, à sa mère ou parle-t-elle pour elle.
Je lui ai donné aucune adresse, je lui ai donné aucun texte, tant pis pour elle si elle a lu ...
Il y a dix ans, elle avait dit " tu écris sur moi " c'était un conte de Noël jamais fini et l'enfant sauveur était une fille...
Je ne lui parle jamais d'écriture mais je ne lui parle pas non plus de sa musique car je ne la connais pas.
Mais la petite de neuf ans veut tout m'apprendre : sa musique, à compter en anglais, ses jeux sur internet.

On cherche la clé pour ouvrir les portes fermées.
Les volets sont fermés, pourquoi ouvrir les portes, pourquoi laisser entrer en moi mon père et ma mère déguisés ?
Pourquoi laisser entrer en moi un grand-père déguisé en mendiant ?
Et le père de mes enfants est aussi présent dans ces histoires tout en étant absent. Il est là chaque fois que je parle de mort, chaque fois que je parle de guerre.
Et le moi qui pousse toujours pour entrer partout, le moi qui s'impose alors qu'on voulait le laisser un peu caché.
Le moi qui s'exhibe alors qu'on ne le voulait pas.
Et pourtant on continue, bientôt je ne serais plus là dans l'histoire, j'attends avec impatience ces jours d'avant ma naissance pour savoir comment l'écriture va se débrouiller à raconter, j'attends cette nouveauté.