Le voyage d'orangette ( 2001 )

" Je suis la plus belle " dit l'orangette. Mais hélas, je ne suis pas mûre et toujours rattachée à ma mère branche. Le soleil, la mer, les voyages m'appellent et je suis prisonnière. Un brusque coup de vent et me voilà à terre.
" Feuille, feuille, cache moi ! je ne veux pas être mangée..." Mais voilà les cueilleurs qui arrivent, ils ramassent, ils entassent.
Mais qu'on ne me laisse pas à terre  " Ecarte toi petite feuille "
Un enfant l'a saisie de ses mains douces. Orangette redoute ses gestes et ses jeunes dents. Il est pressé, tant mieux ! et me voilà rangée dans la caisse. Youpi ! je vais prendre le camion et en route vers le port !
Quelle chaleur ! il ne faudrait pas que ça me gâte... j'aurais préféré le frigidaire !
Un cargo se profile ; Orangette craint ces hommes robustes et enfiévrés qui parfois oublient leurs bières pour se désaltérer avec une orange. Fuir, fuir, impossible rêve !
Cinq jours de traversée, j'étouffe ! et je transpire dans ces cales, j'ai peur que cela ternisse ma robe neuve et luisante car j'ai rêvé d'atterrir chez un peintre, oui, il me serait agréable de poser en nature morte. Mais ne me parlez pas de mourir entre les dents d'un goinfre !
Oh ! si je pouvais crier : " Laissez moi voyager " mais voilà il faut être discrète dans ce monde d'humains dévorants !  Rêvons encore, si je pouvais marcher, j'irais me cacher dans une montagne enneigée !
Orangette apprend l'arrivée en France à midi ; déjà on apercevrait Marseille. Enfin, on appareille !
" Ouf ! nous allons sortir du noir, j'entends le grincement des palettes ! "  Et par chance, je suis sur la caisse de dessus !